1992 – Fabrice Guy – Répéter sans cesse le même saut pour voler plus loin aux Jeux Olympiques d’hiver – Combiné nordique
Et pour cet épisode, j’ai eu la chance d’échanger avec Fabrice Guy, skieur de combiné nordique, sport d’hiver composé de deux épreuves : le ski de fond et le saut à ski. Il est médaillé d’or aux Jeux Olympiques d’hiver d’Albertville en 1992, aux côtés de son copain d’enfance Sylvain Guillaume qui récupère la médaille de bronze. Il sera également porte-drapeau de la délégation française, pour des jeux qui se passent dans son pays.
Il nous raconte la nécessité de la répétition du geste dans les épreuves de saut ainsi qu’une particularité pour un sport olympique, le matériel est réglementé en fonction de la taille et du poids de chacun. Il nous livre également un témoignage touchant du dérèglement climatique qu’il voit et vit concrètement et qui provoque le risque de disparition de son sport, plus vieux sport des Jeux Olympiques d’hiver.
Fabrice Guy
On espère qu’il y aura les filles et que notre discipline continuera, parce que c’est la plus vieille discipline aux Jeux olympiques, quand même, d’hiver. Ça existait depuis le début en fait, il n’y avait pas de ski alpin avant. Les gars, ils faisaient du ski, du ski de fond, et voilà, le ski alpin est arrivé après.
Baptiste Chebassier
Bonjour à toutes et à tous, je suis Baptiste Chebassier et j’écris à la main les 30 249 noms des médaillés olympiques depuis 1896. Cette grande fresque fera une fois terminée 130 mètres de long et je rajouterai pendant les Jeux de Paris 2024 les noms des nouveaux médaillés olympiques. Et pour la première fois, j’ajouterai aussi ceux des médaillés paralympiques dont la base de données n’existe malheureusement pas. Je souhaite rendre hommage à travers ce projet artistique à tous ces athlètes qui s’engagent et donnent tout ce qu’ils ont pour vivre l’aventure des Jeux. Ils consacrent ce qu’ils ont pour moi de plus précieux, leur temps. J’ai longtemps écrit le nom de personnes décédées, et une fois le nom du premier médaillé encore en vie inscrit, j’ai eu envie de partager ce moment d’écriture avec les vivants. Vous écoutez le podcast AMATEURS, qui vous partage dans chaque épisode ma discussion avec un médaillé olympique que je rencontre chez lui, ou par téléphone, pour écrire son nom en sa présence, et qui me raconte son histoire, celle de sa médaille, et celle de son sport. Je découvre que ces médaillés ont tous un point commun avec vous, auditeurs : l’amour, du sport, sont donc comme vous, des amateurs. Et pour cet épisode, j’ai eu la chance d’échanger avec Fabrice Guy, skieur de combiné nordique, sport composé de deux épreuves, le ski de fond et le saut à ski. Il est médaillé d’or aux Jeux Olympiques d’hiver d’Albertville, aux côtés de son copain d’enfance Sylvain Guillaume, qui récupère la médaille de bronze. Il sera également porte-drapeau de la délégation française pour des Jeux qui se passent dans son pays. Il nous raconte la nécessité de la répétition du geste dans les épreuves de saut, le risque de disparition de son sport, ainsi qu’une particularité pour un sport olympique, le matériel qui est réglementé en fonction de la taille et du poids de chacun. Il nous livre également un témoignage touchant du dérèglement climatique qu’il voit et vit concrètement.
Fabrice Guy
Bon alors moi c’est Fabrice Guy. Je suis né le 30 décembre 1968. Je suis originaire du Doubs. J’habite un petit village qui s’appelle Mouthe, un petit village de 1000 âmes, théoriquement connu pour le froid à l’époque. Un moins quarante au village, beaucoup de sportifs, beaucoup de skieurs, qui a eu des grands noms dans le ski de fond et dans le saut à ski. Et bon moi, j’ai éclaté dans le combiné nordique. Mon papa était champion de France de ski de fond, son frère champion de France de saut, et j’ai préféré les deux disciplines.
Ah, c’est un mélange du papa et du tonton ?
Ouais, en gros, c’est ça. Et de la maman qui était skieuse, et ma sœur en équipe de France aussi, et plusieurs titres de championne de France. Le saut à ski est vraiment marqué dans la famille, parce que mon grand-père était starter aux Jeux de 68, il était président du comité régional du Jura, et il a fait pour que les tremplins de Chaux-Neuve soient construits, donc le village natal de mon père, et donc forcément, à 5 km de Mouthe.Donc voilà j’ai fait du saut à ski un peu grâce à ça aussi.
Ok, donc c’est vraiment une histoire de famille, en fait.
Oui, vraiment, oui.
Et vous parliez, vous disiez qu’il faisait très froid, ou en tout cas que Mouthe c’était connu autrefois pour le froid. C’est plus vrai maintenant ?
Bon, le froid, il y a quelques années, de moins 40°C, on est passé à moins 20°C. Quand on a un moins 20°C, on est content. Ça ne dure pas. En fait, avant, j’avais un mois de froid au mois de février, les températures étaient toujours négatives, et maintenant c’est un jour de temps en temps. Il n’y a plus de grands froids comme avant.
Ça change quelque chose par rapport à la pratique du sport ?
Oui, pour nos jeunes, c’est la catastrophe. Cet hiver, par exemple, tous les jeunes qui faisaient du ski de fond, du biathlon, du combiné, n’ont pas pu s’entraîner sur la neige chez nous. Ils étaient obligés de faire du ski à roulettes. Et en fait, ils ne mettaient les skis que pour les compétitions, quand ils allaient dans les Alpes, à l’étranger. Donc c’est très compliqué pour eux. Ils s’entraînent tout l’été et puis ils ne peuvent pas skier sur la neige comme cet hiver, c’est la pire saison qu’on n’a jamais eue.
Ah ouais, ok. Parce qu’il y a des températures négatives, mais il n’y a pas de neige, en fait, c’est ça ?
Oui, en fait, il n’y a pas eu assez…, on était en dette d’eau depuis deux ans. C’était très très sec. Et puis là, le peu de froid qu’il y a fait, c’était trop faible pour que les tremplins de Chaux-Neuve soient utilisés. Il y a eu une ou deux courses pour les gamins sur la falaise, c’est-à-dire l’endroit où on s’arrête et puis un petit peu autour. Et puis sinon le pôle France a Prémanon, sinon ça a été vraiment la catastrophe pour ce qui est de quoi. Alors mon sport, oui, le combiné nordique c’est du saut à ski et du ski de fond. C’est une discipline qui avait disparu en France après les jeux de 1980. La chance qu’on a eue, c’est qu’Albetville a été retenu pour organiser les Jeux. Donc grâce à ça, il y a eu un peu des moyens qui ont été remis sur le combiné nordique puisque chaque pays qui organise, il doit avoir au moins un représentant dans chaque discipline. Et puis donc à cette époque-là, moi j’étais en équipe de France qui n’existait pas, mais en fait j’étais en équipe, je faisais du combiné, c’était un entraîneur de saut qui qui m’entraînait, et puis on se débrouillait un petit peu comme on pouvait en ski de fond. Et après, Jacques Gaillard, le dernier représentant français des Jeux Olympiques, avec Éric Lazzaroni, donc c’est deux anciens combinés, ont repris les rênes et ont créé cette équipe, ce qu’on a appelé un commando pour Albertville, parce qu’il n’y avait pas du tout d’équipe de France. Ils ont pris une dizaine, une douzaine de noms, et puis ils avaient, on va dire, six ans pour remonter l’équipe de France. Ça, c’est la petite histoire du départ.
Ça, ça s’est fait six ans avant, c’est ça ?
Oui, en 86, exactement. Ensuite, la chance qu’on a eue, comme on était une équipe assez nouvelle et très jeune, on a eu la chance de participer aux Jeux olympiques quand j’avais 17 ans, à Calgary. Je pense que c’était super important d’appréhender les Jeux, de voir ce que c’était. Donc grosse expérience pour moi et pour l’équipe. Et moi, dès que j’ai dit que je serais champion olympique quatre ans après quoi. C’était mon objectif direct après ces Jeux-là, je voulais, si j’avais une médaille à faire, gagner un titre, c’était les Jeux. Plus que les championnats du Monde ou les championnats d’Europe. J’ambitionnais tout de suite d’être devant, malgré ma 17ème place au Jeux, mais je ne sais pas pourquoi, je voulais gagner. Les années ont passé, je commençais à faire des podiums en 1990, et puis l’hiver 1991-1992 arrive et je suis en super forme, je gagne les trois premières Coupes du Monde. Donc j’arrive aux Jeux avec le rôle de favori.
On me fait porter aussi le drapeau, donc c’était une expérience incroyable. Et pour moi, les Jeux étaient déjà réussis, rien que de porter le drapeau quoi, de rentrer devant toute la délégation française, amener cette équipe de France. Voilà, c’était un point de départ pour les Jeux. On a découvert le biathlon féminin, ça a fait des médailles avec des anciens, forcément, avec Carole Merle avec Franck Piccard et puis des Legros, des combinés 1 et 2 avec Simanium. Les filles championnes olympiques, Flo Masnada qui gagne le bronze par équipe en combiné, en ski alpin, et puis les Duchesnay qui gagnent le titre en patin à glace sur danse.
C’était une belle année.
C’était une belle année et je pense que ça a aussi servi pour la suite. Beaucoup de jeunes ont regardé ces Jeux parce qu’ils étaient en France. Donc derrière, voilà, la génération Jason Lamy-Chappuis et les Alpins derrière, je pense que ça a été un déclic pour eux. Les Français peuvent gagner en France, et le favori a gagné dans leur pays. Et depuis, en fait, le Combiné est un gros pourvoyeur de médailles, et puis le biathlon aussi quoi.
Ouais. Carrément. Vous avez un peu ouvert la voie à ce niveau-là ?
Je pense, oui, parce que c’est vrai que je me rappelle, à cette époque-là, on disait « Ah oui, de toute façon, lui il est favori, les Français, ils perdent. Quand on est favori, on ne gagne pas de médailles.” Alors moi, je ne suis pas quelqu’un qui lit beaucoup les journaux, heureusement, et qui regarde le passé, moi je regarde beaucoup devant moi, à l’époque. Donc, du coup, ça ne m’a pas du tout gêné d’avoir entendu, oui, entendu, parce que moi, je ne prenais pas attention à ça.
J’ai l’impression qu’il y a un gros ancrage local autour du territoire. Et je me demandais sinon, qu’est-ce qui fait qu’on fait ce sport-là ? C’est quoi la typicité de choisir le combiné nordique et des deux épreuves qui l’incluent ? C’est quoi cette typicité par rapport aux autres sports d’hiver ?
Je dirais, il y a une trentaine d’années, c’était tu fais du foot, du vélo l’été, et puis tu fais du ski l’hiver. Et du moment qu’il y a des tremplins, tous les gamins ont essayé de faire du saut à ski. Le ski de fond, tout le monde en fait, naturellement, avec l’école, avec ses parents. Le ski alpin, pareil, les petites pistes, on sait très bien que de toute façon, on ne peut pas rivaliser avec les Alpes, donc on se focalise plus sur le ski nordique. Et puis, voilà, depuis 30 ans, avec les tremplins construits, plus maintenant les pas de tir, ce qui fait que bah voilà, on est en basse altitude, autour de 1000 mètres. Jusqu’à maintenant, la neige tombait quand même jusqu’à 1000 mètres. Le froid était là. Donc ceux qui sont en équipe de France arrivent à s’en sortir parce que les stages, ils les font à l’étranger ou dans les Alpes. Mais voilà, c’est pour la suite que c’est compliqué. Alors maintenant, pourquoi le Nordique? Ça a toujours été une terre nordique, voilà, par rapport à l’altitude, par rapport au relief, ça ressemble un petit peu à ce qu’on trouve au-dessus de Grenoble, Autrans, Villard-de-Lans, un petit peu des montagnes un peu moins hautes mais où la pratique du ski de fond a toujours été importante. C’est à dire que les gens se déplaçaient de ferme en ferme en ski et puis les enfants allaient en ski au village à l’école. Je pense que c’est ancré dans nos gènes et puis on aime vraiment ce sport.
Et pour le saut ?
C’est pareil, c’est ancré dans le village de mes ancêtres, de mon grand-père. Il y a toujours eu des familles de sauteurs. Alors le saut à ski pourquoi? Parce que on aime arriver en haut d’une bosse pousser et voler, et pareil, c’est un peu une forme de jeu. Après, il y a eu des Jeux olympiques, des sélections olympiques, il y a eu des records de France de 100 mètres, il y a eu des records, voilà, des premiers à 100 mètres, des premiers à 150 mètres, et puis on aime regarder ça. Les gens viennent voir les compétitions qu’il y a à Chaux-Neuve tous les ans depuis 20 ans, et puis ça fait des émules. Les enfants ont envie d’imiter leur parents et puis voilà ça se perpétue comme ça même si ça reste une toute toute petite discipline.
Parce que du coup, en fait, c’est pas tellement pratiqué ailleurs en France, c’est ça ?
On va dire autour de Autrans parcequ’il y a eu des Jeux en 1968, dans les Vosges parce qu’il y a des petits tremplins et que ça a été un pourvoyeur de nordique autant en fond, biathlon et sauteur parce qu’il y a des tremplins dans les villages. Et puis un petit peu quand même en Savoie suite aux Jeux de 92, mais il y a très peu de sauteurs, sauteuses, et puis encore un petit peu en Haute-Savoie mais ça vivote.
Oui parce que le saut c’est aussi une épreuve qui se porte toute seule, enfin qui n’est pas forcément dans le combiné.
Exactement il y a le saut à ski et le combiné nordique, il y a les deux épreuves.
Et les règles elles sont différentes entre les deux ?
Non. Sauf que la différence, c’est que nous après on prend les skis de fond aux pieds. Donc le classement du saut fait que celui qui gagne le saut part en tête. C’est une Gundersen, c’est-à-dire que les points sont transformés en secondes. Ça doit être 10 points ou plus, e ne sais plus combien c’est maintenant, 15 ou 20 points = une minute. On part avec une minute de retard si on a 20 points de retard en saut à ski. Et c’est une course poursuite. Le premier arrivé après le ski de fond a gagné l’épreuve.
À partir de combien de pénalités, c’est beaucoup ?
40 points c’est trop maintenant. Parce qu’en fait les sauteurs sont devenus des très bons fondeurs donc a plus d’une minute ça devient compliqué de finir sur un podium.
Et pour le saut, c’est celui qui saute le plus loin ?
Pas forcément parce qu’il y a une note de style. Il y a 60 points pour la longueur pour le saut le plus long et 60 points pour le style. Il y a 5 juges qui donnent des notes sur 20, la plus basse et la plus haute tombe donc on garde les trois intermédiaires et ça fait un total sur 60 points maximum et puis on le cumule avec les points de longueur. Donc celui sur un saut qui a le plus de points part en tête. Mais le style compte parce qu’il y a un télémark à faire, il y a être joli en l’air. Il y a des choses qui font qu’on perd des points à l’atterrissage ou en vol.
Ok, donc c’est pas juste… il y a vraiment une note de style qui est importante sur le contrôle du mouvement etc.
Oui, la beauté du geste contrôle du mouvement, l’atterrissage, l’élégance, il y a tout.
Et la vitesse, ça compte ?
La vitesse aide à aller loin, mais c’est pas forcément le mec qui va le plus vite qui va le plus loin. Le vol est beaucoup plus important, la poussée à la table est beaucoup plus importante que la vitesse générée en glissant sur les rampes.
OK, donc si je résume, vous me dites si je me trompe, donc on part d’en haut, en haut du sautoir, avec les skis dans des rails un peu. Et donc là, j’imagine que plus on fléchit, plus on va vite.
Oui. Enfin il y a a une position aérodynamique et aussi qui vous permet de partir dans le bon degré pour avoir le moins de freinage possible en quittant la table. Et c’est celui qui prend le mieux ses skis sous lui et qui glisse sur l’air qui va le plus loin.
Et après, il y a la poussée. C’est ça que vous disiez, la poussée. Juste au moment où ça remonte, de tendre les jambes ?
En fait, ça ne remonte pas, le tremplin il descend. La table, elle est à 10 degrés. Ce n’est pas un kick, nous, ça descend, il faut pousser vraiment. C’est pour ça que le saut à ski est particulier. On ne se laisse pas aller et on va loin. C’est vraiment on pousse pour aller loin.
Ok, très clair. C’est impressionnant, j’avais vu le film Eddie The Eagle, mais c’est un peu la seule référence, j’avoue, que j’avais sur ce sport.
En fait, c’est un sport où il faut commencer assez jeune. Et puis, en fait, c’est la répétition d’un mouvement. Comme on dit, pour réussir en saut, comme il est, il faut sauter un jour sur deux. Donc, en fait, on fait une semaine de stage, une semaine à la maison, en gros, c’est ça. Il faut sauter en gros 200 jours par an parce que c’est un sport qu’on répète, qu’on répète, qu’on répète. Ça va tellement vite à la table on arrive entre 80 suivant les tremplins jusqu’à 100km/h. Donc on fait une poussée en quelques dixièmes !
Donc si on pousse trop tard, les skis montent à la figure on freine, si on pousse trop tôt, les skis ont une incidence et en fait ça ne porte pas. Donc c’est à force de répéter un mouvement qu’on arrive à réussir. C’est vraiment un sport où il faut beaucoup de temps pour réussir.
Ok, donc en gros il y a, si on va dire, on fait 10 sauts 200 jours par an pour arriver au dixième près de seconde à faire le bon geste au bon moment.
Exactement. Donc il y a beaucoup un travail mental, et puis bien sûr un travail physique parce qu’il faut avoir des bonnes jambes, pousser très fort et être très relâché du haut du corps enfaite. C’est que les jambes qui travaillent, le haut du corps n’intervient pas.
Et du coup, il y a des gabarits plus avantagés que d’autres, j’imagine ?
Oui, quelqu’un qui est longiligne fin et qui a un rapport taille-poids on va dire de moins 15 à moins 20 par rapport à la taille c’est pas mal quoi. Si on fait 1m80 et 60 kilos on a plus de chances de voler plus longtemps que si on fait 1m70 70 kilos ça c’est sûr., On dit qu’un kilo, c’est deux mètres de perdu. Plus on est lourd, plus on est attiré par la terre.
Et du coup, est-ce qu’il y a, comme à la boxe, ces moments où on essaye de perdre de la flotte avant de se lancer ?
Oui, pas de la flotte, on essaie d’être affûté tout le temps. Oui, la flotte, c’est forcément, mais c’est surtout on évite d’avoir des gros muscles parce que le muscle est lourd. On essaie d’être des gens longilignes donc voilà, on n’est pas des mangeurs de… On ne mange pas comme mange un fondeur, qui a besoin de beaucoup d’énergie pour faire du ski de fond.
Ok. D’où, du coup, l’intérêt de combiner ces deux disciplines, en fait.
Ouais, c’est ça qui est sympa. Franchement, que du saut à ski, ce n’est pas facile, parce qu’il faut un gabarit vraiment très spécifique, très longiline et très léger et pui s y a quand même beaucoup de sauteurs. Quand on fait un concours y a que les 30 premiers qui remontent donc c’est quand même assez frustrant. Quand on est 80 au départ et qu’il y en a que 30 qui font la finale. Alors que le combiné nordique on est 50-60 au départ et tout le monde peut faire la course. C’est le gros avantage.
Il y a une année, on peut être très bon fondeur, donc partir un peu loin et remonter. Et on essaie avec les années de s’améliorer en saut à ski souvent. C’est souvent quand même le saut à ski qui est déterminant, quand même malgré tout. Donc il faut être très bon sauteur et puis après essayer d’avancer vite sur les skis de fond.
Ok. Trop cool. C’était une belle explication. Je visualise bien maintenant l’effort que ça demande, ou en tout cas, quel type de sport c’est, quoi.
Ouais, c’est ça, ouais. En fait, c’est la discipline, le règlement fait ce qu’on devient en fait. Le corps, il s’adapte aux notations, et puis différences se font sur le saut à ski en l’air.
Mais du coup, si on saute 10 fois par jour pendant 200 jours, on tombe combien de fois ?
Pas beaucoup. J’ai sauté pendant 25 ans, j’ai dû tomber une dizaine de fois. On ne tombe pas beaucoup, on fait beaucoup de gym. On sait vraiment très bien où on est dans l’espace avec notre corps, donc voilà on tombe pas beaucoup.
Ah ouais donc 25 ans, si on dit 1000 sauts par an, ça ne fait vraiment pas beaucoup en fait.
Non, c’est exactement ça. En gros c’est ça entre 1000 et 1200 sauts par an. Il y en a qui tombent plus que d’autres, mais c’est des chutes souvent dues à l’atterrissage, mais pas forcément, rarement en l’air.
Et vous parliez de… Vous avez été porte-drapeau ?
Oui, j’ai porté le drapeau au 92.
Qu’est-ce que ça fait ? Parce que moi, dans ce que… Si j’avais aussi autant envie de vous parler, c’est que vous êtes le seul Français vivant à avoir porté le drapeau en France.
Ah en France oui oui vous avez raison puisque les Jeux d’avant c’était 1968 donc je sais pas si la personne qui portait le drapeau est encore en vie.
Ah oui, c’est vrai, j’avais oublié Grenoble. Je pensais à 1924. Et comment on choisit le porte-drapeau ?
Ah bah ça c’est pas moi qui choisit en fait. C’est par rapport aux résultats. Nous à l’époque c’était une petite discipline, j’arrivais vraiment de nulle part. Il y a eu le capital, je pense un peu, sympathie, c’est-à-dire qu’à l’époque, Jean-Claude Killy, Monsieur Barnier, j’ai tout de suite senti qu’il y avait quelque chose avec eux, par rapport à cette équipe de France. Une petite discipline, des compétiteurs assez jeunes, et eux ils voulaient quelque chose de nouveau en fait. Et c’est eux qui ont proposé avec les instances du Cojo, moi j’y suis absolument pour rien, j’ai été choisi comme ça par ces gens-là.
Oui, parce que je crois que j’ai vu que cette année, pour les Jeux de Paris 2024, c’est les athlètes qui éliraient leur porte-drapeau.
Oui, exactement. Ça change. C’est bien aussi, parce que ce n’est pas toujours aux instances de décider. Si les athlètes veulent quelqu’un qui les emmène dans le stade, je trouve ça génial aussi.
Oui, moi je trouve ça très cool. Je trouve du coup qu’on sent bien l’esprit équipe de France au sens large et on choisit son capitaine.
Exactement.
Du coup, j’ai regardé entre-temps, c’est Gilbert Poirot.
Gilbert, il est mort il n’y a pas très longtemps.
C’est ça.
Ça a été mon entraîneur aussi. Justement, les années où il n’y avait pas encore d’équipe de France, de combiné nordique, c’est lui qui m’entraînait. Il a fait les Jeux de 68 et il a fait des très belles performances d’ailleurs, 10e place, c’est un Vosgien, justement.
C’est marrant, ça a été votre coach et vous avez tous les deux été porte-drapeau.
Ouais, c’est vrai.
C’est une belle histoire.
C’est une belle histoire, ouais.
Et en tant que, entre guillemets, athlète d’hiver, est-ce qu’on est autant passionné par… Est-ce que vous êtes autant passionné par les Jeux d’été ?
Tous les sports. J’adore tous les sports, je pratique le plus possible de tous les sports que je peux pratiquer. C’était le gros avantage aussi que j’ai eu avec mes entraîneurs, c’est qu’on ne s’est pas arrêtés à notre discipline. On a tout testé, on a tout… On imaginait, on imaginait, on imagine encore que chaque sport peut apporter quelque chose. Le ping-pong, le tennis, les placements, le ping-pong, les réflexes. J’adore le vélo, maintenant je fais du paddle. Enfin voilà, c’est l’avantage d’avoir eu des entraîneurs hyper ouverts on a bossé comme des haltérophiles pour pousser. pousser de la fonte, comme ils faisaient, pour avoir une détente incroyable, on a joué beaucoup au volley, on a joué beaucoup au tennis, on a joué voilà multisport. Et puis après, moi, ça m’a ouvert l’esprit. J’adore tous les sports de vitesse, les sports aussi de glisse, forcément. Donc vitesse, que ce soit du karting, que ce soit de la moto, que ce soit de la voiture. J’adore tous les skis, les sports d’hiver. Et je regarde tous les sports à la télévision et j’ai beaucoup d’émotions quand je vois les Français marcher.
Ça va être des Jeux, j’espère, magnifiques.
Ça j’en suis sûr. Ce n’est pas possible autrement.
Là, les moyens sont mis.
Oui, on sait organiser, on sait faire. On a cette culture-là. On a fait la Coupe du monde de foot, on a fait une coupe du monde de rugby, on a fait les championnats du monde de vélo on sait faire, puis les gens répondent présents. On est un peu grincheux, quand même les français, mais une fois qu’on est parti dans l’organisation, les gens sont tous derrière, donc c’est cool.
Je suis très d’accord avec ce que vous dites. Et vous avez un conseil pour nos athlètes ?
C’est difficile d’avoir des conseils. Après, déjà du plaisir. Quand on a du plaisir à participer à des Jeux, après sûr qu’il y en a qui vont chercher des médailles. Mais malgré tout, il faut prendre tout ce qu’il y a. C’est tellement un truc énorme. Ne pas se disperser, mais prendre plaisir à participer aux Jeux. Et ce sera beaucoup plus facile.
Pour parler un peu de mon projet, je l’ai appelé AMATEURS, parce que c’est ce que je considère qui réunit les spectateurs et les sportifs, c’est l’amour du sport. En tout cas, c’est comme ça que je le vois. Et donc souvent, je me demande, je cherche un peu le point de bascule où le sport, ou en tout cas les Jeux Olympiques, sont devenus professionnels. Je crois que je n’y suis pas arrivé encore tout à fait, ça dépend des disciplines. Mais est-ce que vous, vous aviez le statut d’amateur ?
Complètement. Ah oui, nous, c’est vraiment une toute petite discipline. La chance qu’on a eue, c’est qu’on avait des contrats avec la douane, l’armée, pour ne pas être professionnel, puisqu’à l’époque, il ne fallait pas être professionnel pour pouvoir faire les Jeux. Tout a évolué maintenant, avec les basketteurs, avec toutes les autres disciplines, le foot et compagnie. Mais nous, à l’époque, on était tous soit douaniers, soit on travaillait à la côté. Je ne dis pas que je ne travaillais pas en douane hein, mais je ne bossais pas 35 heures par semaine à la douane. J’étais détaché pour m’entraîner. C’est le seul moment où les petites disciplines sortent un peu la tête de l’eau parce qu’il y a tellement des grosses disciplines à côté qui écrasent tout. Dans le monde actuel, c’est très compliqué pour les petites disciplines de vivre. Heureusement qu’il y a les Jeux où on voit des athlètes et on voit les difficultés qu’ils ont pour s’entraîner, les difficultés qu’ils ont pour, pour faire leur sport. Donc oui, il y a toujours des disciplines qui sont avantagées sur d’autres, mais heureusement qu’il y a encore les Jeux, pour un petit peu, on va dire, ce monde encore qui, malgré tout, est un peu amateur et qui arrive à briller grâce aux Jeux.
Les Jeux, pour vous, continuent de réaliser cette mission de faire briller le sport amateur ?
Exactement. Exactement. Sans ça, je pense qu’il y aurai beaucoup de disciplines qui auraient déjà disparu. Et on le dit bien, de toute façon, là, le combiné est un peu sur la sellette. Le CIO veut qu’il y ait des filles et des garçons, donc forcément. Et le saut à ski est quand même très particulier, il n’y a pas si longtemps qu’il y a des filles qui font du saut à ski. Donc en saut à ski, ça s’est très bien développé et en combiné, ça arrive. Donc là, on a une Française qui se débrouille bien en Coupe du Monde, mais c’est qu’il n’y a que depuis deux ans qu’on fait des Coupes du Monde pour les femmes. Donc vous voyez, c’est vraiment…
Ah oui c’est très très récent.
C’est peut-être ça qui va nous sauver, on va peut-être pouvoir continuer à être aux Jeux. Si le Comité Nordique n’est pas aux Jeux en Italie en 2026, je peux vous dire que ça va disparaître, il n’y aura plus de combiné nordique en France.
OK, parce que les épreuves, elles n’ont pas encore été déterminées pour 2026?
Oui, c’est ça. On espère qu’il y aura les filles et que notre discipline continuera, parce que c’est la plus vieille discipline aux Jeux Olympiques d’hiver quand même.
Ah ouais?
Oui, ça existe depuis le début en fait, il n’y avait pas de ski alpin avant. Les gars ils faisaient du saut à ski, du ski de fond, et le ski alpin est arrivé après.
Excellent ! De toute façon, au pire, on le remettra en 2030 !
Oui j’espère ! Mais bon il ne faut pas que ce soit retiré des tablettes, parce qu’après une fois que c’est retiré des tablettes au niveau CIO, une discipline ne revient jamais.
Ouais il n’y a pas de retour en arrière. Pourtant c’est un sport en plus spectaculaire, avec des rebondissements, donc j’imagine que, c’est peu connu genre en public mais …
Les gens vont venir le voir, il y a toujours beaucoup de spectateurs. Mais voilà, c’est après très confidentiel. Dans certains pays, il y a du monde mais en France, en combiné, il n’y a pas 40 personnes qui sont capables de faire des courses. Donc ça limite beaucoup.
Et qu’est-ce que ça faisait sur le podium d’être à côté de Sylvain Guillaume ?
Là, nous c’était une sacrée aventure parce que nous on se connaît depuis l’âge de 7 ans. Quand on a commencé le saut à ski, chacun de notre côté, on s’est retrouvé dans le même comité, le comité du Jura. Lui, il est du côté du Jura, moi du côté du Doubs c’est le même massif, et puis en fait les deux villages sont très proches, il n’y a que 10 km. Donc des années je jouais au foot avec Foncine, des années il venait jouer au foot avec Mouthe. Donc nous on a toujours été ensemble depuis qu’on était gamins. Donc se retrouver sur un podium avec les deux villages, avec les personnes qui se connaissent par cœur, parce que voilà, c’est des petits bleds, 2 fois 1000 habitants, donc on a des échanges depuis la nuit des temps, donc voilà, ça faisait un peu… C’est le petit plus quoi, c’est juste incroyable ce qui nous est arrivé.
C’est incroyable ça doit être beau de se retrouver comme ça, en ami d’enfance, à partager ce moment ensemble.
C’était juste incroyable.
Même si j’imagine qu’il y a quand même le premier et y a le deuxième.
Oui, malgré tout. Après, Sylvain n’avait jamais fait de podium avant les Jeux. Son premier podium, c’est aux Jeux. Donc c’est juste incroyable. Il n’était pas sélectionné trois semaines avant les Jeux. Heureusement, il fait une quatrième place qui lui a permis d’être sélectionné, donc ça se joue vraiment en pas grand chose. Et du coup, lui, il avait une motivation sûrement différente de tout le monde par rapport à son frère qui était décédé en moto. Donc lui, c’était son leitmotiv et puis il est allé au bout quoi. Il avait vraiment la rage, il pourra mieux vous le raconter que moi, mais il avait vraiment ça dans la tête. Il a couru pour ça.
OK, c’est une belle histoire.
Oui, exactement.
Triste mais belle. J’avais une dernière question. J’ai lu quelque part, je ne sais plus où, que la discipline avait changé et qu’avant on sautait les skis droits et qu’après ça est parti sur les côtés, c’est ça ?
C’est ça. Alors en fait, le saut à skis, avant on mettait les pieds parallèles. On avait les skis sous nous. Voilà. On va dire en gros, ils tapaient sous notre menton. Et puis après, il y a eu un… Il y a eu un sauteur suédois, Jan Boclöv, qui lui, ses skis devant lui, ça l’emmerdait. Donc il a écarté les pieds. Et en fait, on s’est rendu compte que le corps, plus les skis de chaque côté, il y avait plus de portance. C’est-à-dire qu’il allait beaucoup plus loin que tout le monde. Il n’était pas bon en l’air parce que ça changeait complètement la discipline. Et puis, il a fallu attendre quelques années qu’il y ait un Autrichien, un Allemand, qui se mettent à faire ça. Et puis du coup, on a tous basculé. Il y avait déjà en 92, en combiné, il y en avait 4 ou 5 qui le faisaient. Déjà le V, ce qu’on appelle le V, parce qu’on écarte les pieds, mais on ne peut pas écarter trop large. Et on met surtout les skis de chaque côté des oreilles. Et en saut à ski, ils étaient déjà pratiquement 90% à le faire. Et du coup, ça a switché en 93, tout le monde était en V, parce que ça porte beaucoup plus. Donc moins de vitesse pour prendre la piste d’élan, pour aller plus loin. Voilà, c’est juste ça. C’est juste une histoire, c’est très con comme histoire, c’est comme le demi-pas en ski de fond, c’est un mec qui Siitonen, il a poussé sur le côté, il s’est rendu compte que quand on faisait un changement de direction, on poussait sur le côté et ça le lançait, et du coup il a enchaîné des pas, le pas Siitonen qui est devenu le demi-pas, et puis le skating après, en 86-87. Et le V, les premiers ont fait ça en 89, et puis tout le monde l’a fait en 93.
Donc en fait, ce qui m’interpelle dans ce que vous dites, c’est que ce n’est pas du tout, comme dans d’autres sports, une évolution liée à la technologie, mais c’est vraiment une évolution liée à l’usage.
Exactement. Ça paraît incroyable, mais c’est comme ça. Ce n’est pas le matériel qui a fait, c’est le gars qui , ses skis l’emmerdaient devant les yeux, il a écarté les pieds et puis il s’est rendu compte que ça portait beaucoup plus. Vous comprenez bien que les skis font 11 centimètres de large. Donc on les rajoute avec le corps. Donc la portance, c’est bien plus, forcément.
Et du coup, est-ce qu’on pourrait avoir des skis plus larges ?
C’est comme tout, c’est comme les vêtements qu’on porte, c’est comme les skis, les chaussures. Bien sûr qu’on pourrait, mais c’est limité parce qu’après, on ferait n’importe quoi, ça porte trop, on irait trop loin.
On fait exprès de limiter le matériel, pour pas aller trop loin, pour pas trop se mettre en danger?
C’est ça. C’est à dire que moi je faisais 1m73 je n’avais pas le droit de prendre des skis plus longs que 2m53 et 2kg530 pour les skis. Pas le droit au dessus et pas le droit à plus. Tout est très cadenassé parce qu’après sinon c’est la foire à n’importe quoi. C’est à dire que on met une combinaison par exemple qui devant laisse passer beaucoup l’air, on va dire aller, 50 litres d’air au cm2, et derrière on met 0 bah ça fait parachute donc voilà tout est contrôlé.
Ah excellent. Donc quelqu’un de plus grand, il a le droit à des skis plus grands ?
Oui exactement.C’est un pourcentage par rapport à ta grandeur.
C’est marrant parce que c’est quand même rare dans l’histoire olympique, j’ai l’impression qu’on… La devise, c’est quand même plus vite, plus haut, plus fort ensemble. Et qu’on ait cette volonté de “Faut que tu ailles le plus loin possible, tu vas gagner des points, mais en même temps il y a beaucoup de paramètres “
Tout le monde a le même matériel et surtout avec des normes qui font qu’on ne met pas la personne en danger.
Et donc tout le monde a le même matériel ?
Ah oui, on n’a pas le choix. Déjà, il y a très peu de marques de saut à ski. Je crois qu’il y en a plus que 3. Et puis les combinaisons, il va y avoir 3 ou 4 marques aussi. Donc c’est testé par des directeurs techniques qui tirent au sort des gens avec leurs combinaisons, pour pas tricher. Il y a tout un protocole. On mesure les skis, on pèse la personne. Voilà Il y a tout un protocole avant et après le saut à ski. C’est moins compliqué en ski de fond. En ski de fond, on prend le matériel un peu qu’on peut.
Ouais. Mais du coup, est-ce qu’on peut battre un record du monde encore, en longueur ?
Oui, parce que ça a été battu par un japonais, un ancien combiné qui a fait 280… Je vais pas dire de conneries, mais je crois 280 mètres. Mais pas homologués par la FIS, parce que la FIS n’est pas d’accord que les tremplins aillent si loin. Le record du monde, c’est 254 mètres sur des tremplins homologués par la FIS. Et le Japonais, en l’occurrence, a fait un tremplin en Islande, taillé par des mecs qui sont des shapers, comme on voit ceux qui font les tremplins pour le freestyle. Ils ont taillé un tremplin dans de la neige en fait, dans une pente, et il a prouvé qu’on pouvait aller plus loin que ce qui était imaginable. Donc on n’est pas loin d’arriver à 300 mètres je pense.
Ah ouais, donc il a quand même mis 30 mètres quoi.
Ouais, il a mis 30 mètres au record parce que c’est la fameuse marque Red Bull qui adore faire ces genres de trucs.
Ok.
Mais là ils ont fait quelque chose d’incroyable. Regarde “record saut à ski Red Bull tremplin en Islande”. Le saut est complètement démesuré. Ça doit être 290 mètres ou je ne sais plus un truc comme ça.
Ah ouais, je vais regarder ça.
Ouais, tu peux regarder. C’est vraiment très, très impressionnant. En plus, maintenant, c’est filmé avec des drones, donc c’est juste fantastique.
Ah ouais.
On se croirait dans un jeu, quoi. C’est vraiment comme dans un jeu.
Et donc, vous pensez, au total, on pourrait aller jusqu’à combien ?
Avec des tremplins taillés comme ça, là il est vraiment fait pour que ça aille très loin, c’est-à-dire que le sauteur est jamais très très loin de la pente, pour justement éviter les chutes, pour avoir beaucoup plus de sensations en l’air, on va passer les 300 mètres. Je ne dis pas qu’on n’est pas limité quand même à un moment donné, parce qu’il va falloir aller tellement vite en sortie de table qu’il faut tenir quand même les skis, donc moi je pense que jusqu’à 320, 330 mètres, ça se fera dans les années à venir.
En fait, ils vont finir avec des windsuit et…
Là, en fait, il a quand même sauté avec une commission normale. Si on prend la windsuit, le mec il ne se pose plus. Sauf que l’atterrissage est aussi important que le décollage. Pour valider quelque chose, il faut atterrir les pieds. Tu mets les mains, ton saut n’est pas validé.
Et les fesses, pareil ?
Les fesses, c’est pareil, ce n’est pas validé. Il ne faut pas tomber. Il faut atterrir pieds joints ou télémark, mais ne pas poser ni les fesses ni les mains.
Et il y a des trucs de style, genre on arrive à un pied, ça fait plus de points ?
Non, il faut arriver les pieds écartés, c’est-à-dire qu’on fait un télémark. On doit laisser une fente entre les deux pieds, d’environ 70 centimètres. Ça s’appelle le télémark, qui vient de la région de Télémark en Norvège.
Ben écoutez merci beaucoup pour cet échange. Je vais écrire votre nom avec vous, si ça vous va. Et celui de votre camarade Sylvain.
Ouais, bien sûr.
Et donc là, je commence par le vôtre, dans ma liste. Donc Fabrice Guy. Et maintenant, Sylvain Guillaume. Eh bien, top. Je n’ai pas le nom du troisième parce qu’il avait déjà dû être médaillé et j’ai écrit une seule fois le nom, quel que soit le nombre de médailles.
Ok.
Je ne sais pas si vous vous souvenez de qui était la médaille de bronze.
Oui, Klaus Sulzenbacher, un Autrichien qui avait déjà fait une médaille d’argent aux Jeux d’avant. C’est contre lui que je me suis battu tout l’hiver pour gagner le Globe, le classement général de la Coupe du Monde. Il a terminé deuxième derrière moi.
Ok, ah ouais donc la performance de Sylvain est exceptionnelle.
Oui, oui, là c’était juste incroyable. Il n’a fait que deux podiums dans sa vie. Enfin deux podiums. Un aux championnats du monde, un aux Jeux et puis il a gagné une coupe du monde. Ça, c’est les stats de Sylvain.
Je vous remercie pour votre écoute, et j’espère que cette rencontre avec Fabrice Guy et le combiné nordique vous a plu. C’est un témoignage poignant sur le dérèglement climatique et l’avenir des sports d’hiver je trouve. Je suis personnellement fasciné par l’idée que ces athlètes fassent plus de 1000 sauts par an pour repousser leurs limites et leurs performances en répétant toujours le même geste. Vous pouvez découvrir d’autres histoires de médaillés olympiques sur ce podcast et sur les réseaux sociaux. Si vous avez aimé cet épisode et si vous voulez soutenir le projet artistique *AMATEURS*, n’hésitez pas à vous abonner, à partager ce podcast à vos proches et aux amoureux du sport, à laisser un commentaire et à mettre 5 étoiles sur les plateformes d’écoute. Je vous remercie pour ce moment partagé ensemble, pour votre temps, et je vous dis à bientôt.